Le Royaume de Tobin, de Lynn Flewelling

Publié le par Black Moon Dream

Comment résister à l'envie de faire un article détaillé sur mon cycle coup de coeur 2010? C'est donc tout naturellement que je publie ma toute première critique littéraire de mon blog sur le cycle complet du Royaume de Tobin.

 

D'abord, une présentation s'impose. Le Royaume de Tobin est un cycle composé de six tomes, disponibles en poche aux éditions J'ai Lu, écrit par Lynn Flewelling, une écrivaine américaine, et mettant en scène les aventures du jeune Tobin, prince légitime du royaume de Skala. Voilà, les choses pourraient être simples si elles s'arrêtaient ici, mais c'est un brin plus compliqué que cela.

http://multimedia.fnac.com/multimedia/images_produits/ZoomPE/8/7/3/9782290344378.jpgEn effet, la religion de Skala vénère quatre dieux, dont deux en particulier qui sont les protecteurs du pays: Illior, dieu de la sagesse, et Sakor, dieu de la guerre. Bien des siècles avant le début du premier tome, une guerre sans merci contre les Plenimariens, un peuple voisin, menaça d'engloutir le royaume. C'est alors qu'Illior s'adressa au roi de Skala par une prophétie lui dictant d'abdiquer en faveur de sa fille unique, qui n'avait pas vingt ans, afin d'obtenir la victoire. Le royaume sauvé, la jeune reine fut la première d'une longue lignée de souveraines, la prophétie disant que tant que le royaume de Skala serait gouverné par une descendante de cette première reine-guerrière, il ne risquerait pas de se faire asservir.

Cependant, cela n'était guère au goût de divers héritiers mâles à travers le temps, et notamment du dernier en date, le roi Erius, qui usurpa le trône à sa jeune demi-soeur, enceinte de jumeaux, en tuant au passage toutes les potentielles héritières au trône, même très éloignées, mis à part cette dernière, afin d'assurer la pérennité de sa propre lignée mâle. La princesse donna le jour à une fille et un garçon, le second étant sacrifié par des mages pour permettre à la petite fille de revêtir l'apparence d'un garçon afin de la protéger.

C'est donc sous les traits d'un garçon que Tobin grandit, ignorant tout lui-même de sa véritable nature, qui ne lui est révélée qu'au troisième tome. Dès lors, apprenant la vérité et ce à quoi elle est destinée, la jeune fille devra se consacrer à récupérer son trône afin de sortir enfin Skala des tourments et des plaies infligées par le dieu mécontent et par les attaques des Plenimariens.

 

D'un point de vue général, on peut remarquer de nombreuses qualités au cycle. Tout d'abord, la plume de l'auteur est particulièrement agréable. On a l'impression de se laisser couler dans le livre comme on le ferait dans un bain. On passe sans le moindre mal de notre monde à nous au royaume de Skala, d'autant plus que l'univers de Tobin est très détaillé et facile à se représenter. Il faut dire que pour cela, l'auteur a pris le temps de tout bien mettre en place durant le premier tome. C'est un reproche que certains lecteurs impatients pourront faire, ce tome-ci (Tome 1: Les Jumeaux) est particulièrement avare en péripéties. On y découvre l'Histoire de Skala, le contexte, les personnages (qui sont d'ailleurs très soignés), l'environnement immédiat du petit prince, mais peu d'éléments faisant avancer l'action.art-tobin1

Cela change dans le second tome (Tome 2: Les années d'apprentissage; cf vignette ci-dessus), avec l'arrivée d'un personnage clé du cycle: Ki. En plus d'être un personnage attachant à souhait (je suis tombée sous le charme), c'est lui qui est le moteur du roman a bien des moments. Par ailleurs, l'évolution de sa relation avec Tobin tout au long des tomes est un plaisir à surveiller pour le lecteur, qui, lui, connaît toute la vérité depuis le 1er tome, et peut donc déduire des choses aux indices que l'auteur lui pose.

Les personnages sont également un gros point fort du cycle. Contrairement à certains qui ont des protagonistes fades et des personnages secondaires effacés, ceux du Royaume de Tobin sont hauts en couleur et très soignés. Tobin à lui seul est déjà une énigme permanente. A cela s'ajoutent une panoplie de personnages attachants au possible: Ki, Tharin, Arkoniel, Lhel, Korin (dans un premier temps, du moins)... Et au contraire, on rencontre également des figures bien moins sympathiques, qu'on en vient à haïr au point de vouloir rentrer dans le livre pour en finir nous-même avec eux. Je pense notamment à Nyrin, qui est probablement l'un des personnages les plus exécrables qu'il m'ait été donné de rencontrer.

 

Ensuite, bien entendu, il est impossible de ne pas parler des qualités de l'histoire en elle-même. La première originalité tient déjà au fait que la lignée légitime de Skala soit féminine. Beaucoup de romans fantasy sont calqués sur le système politique du Moyen-Âge européen, et donc sur la loi salique prévoyant que seuls les héritiers mâles peuvent accéder au trône.

De plus, ici, on peut oublier toute présence de "classique". Pas d'Elfes, de Nains, une place de minuscule détail pour les dragons, pratiquement pas de créatures fantastiques (on se contente de mentions par des personnages). La trame est axée sur les humains et les divers peuples qu'ils comportent, avec leurs relations compliquées. On trouve des magiciens, mais organisés d'une façon originale et spécifique en être errants, solitaires, craints et martyrisés par le régime. L'auteur a également intégré des nécromanciens dans les rangs des Plénimariens, branche de magie relativement peu utilisée dans les romans. On peut aussi noter la présence importante des fantômes dans le cycle, dès le début et jusqu'à la fin du dernier tome.

 

http://image.mabulle.com/f/fe/feechoco.mabulle.com/livres/royaume5.jpgLes seuls défauts que j'ai pu relever sont relativement minimes. Tout d'abord, j'ai regretté que le dernier tome s'arrête si peu de temps après la bataille finale, et ne permette pas de voir en détail ce qui se passe par la suite, l'épilogue ne donnant que de maigres informations qui nous forcent à nous imaginer par nous-même ce qui a pu se produire. J'aurais personnellement aimé en savoir plus.

La seconde déception tient au fait que l'auteur lance une intrigue avec le bol maudit qu'Iya puis Arkoniel doivent garder, et qu'elle ne l'exploite pas plus que cela. On ne sait pas au juste à quoi il peut bien servir, quel danger il représente, ni quel est son intérêt dans toute cette affaire. Prévision de suite axée là dessus et avortée? Idée maladroite qui aurait gagné à être retravaillée? Détail dont on aurait pu se passer? Difficile à dire.

 

En tous les cas, Le Royaume de Tobin est un cycle qui m'a touchée jusqu'au fond du coeur, comme cela m'arrive rarement. Etant un cycle à la fois court, prenant, existant en poche, et abordable par un large public, je le conseille à tous ceux qui désireraient tenter l'aventure, et se perdre eux aussi avec délices dans le royaume magique de Skala.

Publié dans Livres

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Commenter cet article
A
<br /> « Le royaume de Tobin » est le produit d’un de mes auteurs préférés. Lynn Flewelling est entrée dans mon panthéon personnel des auteurs à déifier au côté de Robin Hobb, Raymond E. Feist (bien que<br /> ces deux là me déçoivent de plus en plus ces derniers temps) et plus récemment de Jacqueline Carey. Son monde et ses personnages peuplent mon imaginaire et les colorent de teintes vives et sombres,<br /> de dieux cruels et de choix difficiles.<br /> Tu as souligné les grandes lignes de l’œuvre, j’espère que ça va en accrocher quelques-uns car c’est vraiment un chef-d’œuvre. L’écueil que tu soulignes, le manque d’action dans le tome 1<br /> correspond en fait à une pratique courante de l’édition française qui consiste à disséquer l’œuvre originale Xx. Le tome 1 et 2 constitue un tout, ce qui explique le manque d’action (à imputer à la<br /> maison d’édition et non au talent de conteur de l’auteur).<br /> Son goût du macabre, les fantômes et démons en tout genre, avec des scènes proches du cauchemardesque ajoutent une touche noire à un texte haut en couleurs, aux personnages sympathiques et<br /> dérangeants. Avec un talent très particulier, elle parvient à saisir le passage délicat de l’adolescence et des premiers émois, parfaitement mis en valeur par l’ambiguïté sexuelle de<br /> Tobin/Tamir.<br /> J’apprécie tout comme toi son talent pour dépeindre des personnages, qui même secondaires, sont intéressants, parmi mes préférées, Yrena, Nalia ou la petite fille muette. Je te suis quand tu<br /> considères N. comme un personnage détestable, mais j’ai pourtant du mal à l’apprécier en tant que personnage, car je le trouve bâclé. La folie est un thème récurrent chez Flewelling, mais N. qui<br /> l’incarne est trop … simple et donc insatisfaisant. En faire le principal protagoniste du mal et attribuer les méfaits de la lignée mâle et leurs faiblesses à ses manipulation me paraît trop<br /> facile. C’est mon seul regret sur le texte.<br /> En ce qui concerne le fameux bol et les Gardiens, tu peux aller chercher la réponse dans Nightrunner series, qui compte actuellement quatre et bientôt cinq volumes (sortie juin 2010 youpi). La<br /> réponse se trouve dans les deux premiers tomes qui constituent un diptyque à part entière. Je pense qu’ils ont été traduit, mais je ne sais pas sous quel titre, en anglais Luck in the Shadows et<br /> Stalking Darkness. A lire à la suite pour ne pas trépigner de frustration …<br /> <br /> <br />
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N
<br /> Yaeh! Le royaume de Tobin! J'adore cette série! Alliant mystère, magie, suspence, amour et bien plus encore!<br /> Faut d'ailleurs que je trouve le temps de lire le 5eme tome >.<br /> <br /> <br />
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